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La main-d'oeuvre agricole saisonnière transportée quotidiennement de la région de Montréal : profil socio-économique et insertion professionnelle

Date

1997-05-27

Auteurs

Myriam Simard et Isabelle Mimeault

Number of pages

182

Éditeur

INRS

Notes

"l’alternance travail/chômage/aide sociale exprime la
vulnérabilité et marginalisation vécues par ces travailleurs sur le marché de l’emploi. Ils peuvent parfois occuper, en dehors de la saison agricole, de petits boulots dans les agences de placement de main-d’oeuvre ou les manufactures, reconnus pour leurs bas salaires. De fait, nous avons constaté d’emblée que l’emploi agricole saisonnier transporté est conçu comme – et semble effectivement être – un emploi de dépannage.
Ainsi, l’emploi agricole est pour la majorité des immigrants – qui ont une charge familiale élevée et, par surcroît, qui envoient de l’argent à leurs parents restés au pays d’origine– une question de survie. La
différenciation importante constatée à ce chapitre entre immigrants et natifs s’explique par cette charge familiale des premiers, sans aucune mesure avec celle des seconds, et par les contraintes et obstacles
supplémentaires vécus par les requérants du statut de réfugié, immigrants les plus vulnérables, qui composent une partie importante de la main-d’oeuvre agricole occasionnelle autour de Montréal. Plusieurs immigrants vivent de toute évidence une situation de dénuement quasi total au moment d’entrer dans le secteur horticole (p.132)"

"Ainsi, sur le plan des conditions de travail, le manque de respect caractérise les rapports sur certaines exploitations agricoles: non-respect des normes de travail, non-respect de la santé des travailleurs, nonrespect de leur dignité humaine. De façon quasi unanime et en concordance avec l’ensemble de nos données objectives, les répondants affirment l’existence de discrimination, sur certaines fermes, à l’endroit des immigrants, particulièrement les Noirs, et peut-être davantage encore les hommes Noirs. La discrimination
peut se constater dès l’étape du recrutement, puisque tous les répondants immigrants ont déjà connu des difficultés pour se faire embaucher et que des Noirs se trouvent être exclus de certains lieux, de certaines fermes, situations que n’ont pas connues les natifs de notre groupe témoin. La brutalité langagière et les pressions, le non-paiement de temps de travail, l’absence de toilettes, la rareté ou l’insalubrité de l’eau, toutes ces atteintes à la dignité des travailleurs dévalorisent l’emploi agricole . Des rapports sociaux bien concrets sont donc à la source et entretiennent l’inégalité caractérisant le statut de travailleur agricole occasionnel (p.133)."

"Au niveau du patron, de porter plus attention à la relation humaine, aussi... puis aux besoins, pas nécessairement juste physiologiques des gens mais aux besoins psychologiques aussi, parce que c’est un travail qui se déroule assez vite et c’est un travail de longue durée. Pendant neuf heures, on est pris dans la même position, dans les mêmes choses. Là, c’est sûr qu’il faut créer un climat quand même agréable, pour que les gens arrivent à être détendus, à être bien dans leur peau [...]. De la part des employeurs, peut-être, revoir un peu leurs attitudes envers les employés [...]. Ils nous prennent pour des machines: on est juste des machines qui ne font toute la journée que ramasser, ramasser. On n’est pas juste ça. Il faut savoir aussi travailler avec les gens. (Entrevue 14, immigrant)" (p.126).

"L’absence d’eau et de toilettes étant une question qui les préoccupe, il n’est pas étonnant que des travailleurs ait mentionné ces éléments comme des améliorations prioritaires à apporter" (p.128).

"Six éléments sont particulièrement ressortis :
1-un endroit propre où manger, avec des tables, des verres, protégé du soleil;
2- un endroit où mettre le lunch et garder la nourriture au frais: un frigidaire;
3- un espace pour changer de vêtements;
4- un espace de rangement pour le sac à dos;
5- un endroit pour s’asseoir un peu, durant les pauses;
6- un endroit où il y ait de l’eau chaude pour pouvoir se réchauffer, en automne (p. 128).

"Une recommandation émerge plus souvent que les autres: que les SEA encadrent les producteurs et veillent de près au respect des droits des travailleurs ainsi qu’au maintien des conditions de travail minimales:
eau, toilettes, bon accueil sur les fermes... En conséquence, que les producteurs ne respectant pas les règles ne reçoivent pas de main-d’oeuvre des SEA (p.130)."

Dans certaines productions au rendement, telles les fraises ou les framboises, il arriverait que natifs et immigrants travaillent séparément, ces derniers se retrouvant dans un champ moins rempli. C’est ainsi que certains travailleurs immigrants réussiraient à accumuler des salaires aussi maigres que 5 $, 15 $ ou 35 $ pour une journée, comme nous l’avons évoqué précédemment. Cette native a bien vu le manège:
"C’est comme où on est présentement, la première semaine, ils nous ont mis, nous autres, dans les belles fraises puis le reste de la gang, ils les ont mis dans un champ qui était pas beau [...]. Oui. Puis
ça été une semaine, une semaine et demie comme ça. Nous autres, dans l’fond, on était ben content [...]. Oui, les Québécois, leur monde à eux autres qui sont là le matin là, on était dans les belles, dans
l’beau champ que les fraises étaient toutes ben sorties [rire] [...]. Oui, ça, j’ai vu ça. (Entrevue 46, native)" (p.106).

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