2013-09-08
Radio Canada and Normand Grondin
Reportage de Normand Grondin
2:54
Radio Canada
Exclusif - Malgré la main-d'oeuvre étrangère, les producteurs maraîchers manquent souvent d'ouvriers. La solution : recourir aux agences de main-d'oeuvre locale. Avec les risques que cela comporte.
Beaucoup de Montréalais ont remarqué ces autobus scolaires qui se présentent très tôt le matin à plusieurs stations de métro du nord-ouest de la ville. Ils sont affrétés par des agences qui recrutent quotidiennement des centaines d'ouvriers agricoles.
Radio-Canada a découvert que plusieurs agences paient leurs employés au noir, sous le salaire minimum. Et comme le démontre notre caméra cachée, tout cela est fait ouvertement.
Les ouvriers se dirigent ensuite vers les entreprises maraîchères situées au sud de Montréal. Départ à 6 h et retour vers 20 h. C'est comme ça, sept jours par semaine, du printemps à la fin des récoltes. Et tout le monde ferme les yeux, ou presque.
« On travaille dans le domaine des fruits et légumes, c'est des produits qui sont périssables et quand le légume est prêt à être récolté, il faut le récolter, sans ça on le perd », affirme André Plante, directeur de l'Association des jardiniers maraîchers du Québec.
Selon l'association, ses membres n'ont rien à se reprocher. Ce sont les agences de placement de main-d'oeuvre qui sont en faute.
« Ce n'est pas pour payer la main d'oeuvre moins cher, au contraire. On la paye cette main d'oeuvre plus cher. C'est juste parce qu'on est mal pris et qu'on n'a pas d'autres alternatives qu'on prend ces gens-là », poursuit André Plante.
Les producteurs paient l'agence entre 15 et 17 $ de l'heure pour un ouvrier. Un montant qui inclut le salaire minimum (10,15 $), la TPS, la TVQ et les cotisations de la CSST.
Pourtant, c'est en moyenne 8 $ l'heure que les ouvriers reçoivent. Et 8 $ sous la table. Où va le reste de l'argent? Dans les poches des agences qui réclament des frais aux producteurs, mais ne les remboursent pas au gouvernement.
« Le problème c'est que souvent ils vont commencer des travaux, ces agences-là, avec un producteur et vers la fin de la saison, fermer l'entreprise et repartir sous un autre nom. Si le gouvernement n'est pas en mesure de repérer cette entreprise, ben là, il va revenir contre le producteur. » , soutient M. Plante
Incapable de retrouver les coupables, Revenu Québec a envoyé des avis de cotisations à au moins une dizaine de producteurs. Les montants varient entre 100 000 et 200 000 $ par producteur.
L'Union des producteurs agricoles (UPA) est au courant de la situation. « On invite les producteurs à la prudence, à utiliser des sous-traitants qui ont pignon sur rue depuis un bon bout de temps, un peu comme n'importe qui qui va utiliser quelqu'un pour faire des travaux chez lui », indique Denis Roy, directeur des finances à l'UPA.
Mais dans les faits, les agences continuent d'ouvrir et de fermer sans problème. Et les producteurs se sentent coincés.
« On va se dire les vraies choses : si le gouvernement met ça très, très rigide, ça risque de disparaître ces agences-là. Et si ces agences-là disparaissent, de l'autre coté là nous on règle pas notre problème de pénurie de main-d'oeuvre. », estime le directeur de l'Association des jardiniers maraîchers du Québec.
D'après un reportage de Normand Grondin
Agriculture and horticulture workers
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